Publi? le 20 août 2010 dans Économie
Les nombreuses erreurs de perspectives au sein du mouvement ouvrier sur l’évolution de la crise et de la lutte de classe sont à rattacher aux visions catastrophistes sur la dynamique et les contradictions du capitalisme. Non seulement Marx n’a jamais défendu une telle vision, mais sa conception était toute autre. Telle est le sujet de cet article.
Une des sources de ces erreurs récurrentes réside dans l’idée que Marx aurait défendu une théorie de l’effondrement économique inévitable du capitalisme : « Si on le comprend bien, le schéma marxien de l’accumulation est par son insolubilité même le pronostic exact de l’ effondrement économique inévitable du capitalisme… » [1]. Rosa Luxemburg attribue la paternité de cette idée à Marx et la réitère à longueur de pages dans son ouvrage sur L’accumulation du capital [2]. Sans cette assise matérielle, soutenait R. Luxemburg, « le socialisme perd le fondement de granit de la nécessité historique objective,… », et les révolutionnaires ne peuvent alors que « s’enfoncer dans les brumes des systèmes et des écoles pré-marxistes qui prétendaient faire découler le socialisme de l’injustice et de la noirceur du monde actuel, ainsi que de la volonté révolutionnaire des classes laborieuses » [3]. Elle rejoignait ainsi la même démarche qu’empruntera plus tard Henryk Grossman, à savoir la nécessité de fonder le socialisme sur une « démonstration économique de l’écroulement du capitalisme » [4].
En réalité, Marx n’a jamais développé une telle idée ; il défend une vision du processus révolutionnaire qui est toute différente : « Les contradictions capitalistes provoqueront des explosions, des cataclysmes et des crises au cours desquels les arrêts momentanés de travail et la destruction d’une grande partie des capitaux ramèneront, par la violence, le capitalisme à un niveau d’où il pourra reprendre son cours. Les contradictions créent des explosions, des crises au cours desquelles tout travail s’arrête pour un temps tandis qu’une partie importante du capital est détruite, ramenant le capital par la force à un point où, sans se suicider, il est à même d’employer de nouveau pleinement sa capacité productive. Cependant ces catastrophes qui le régénèrent régulièrement, se répètent à une échelle toujours plus vaste, et elles finiront par provoquer son renversement violent » [5].
Dans la description de cette spirale de « contradictions » créant « des explosions, des crises, des cataclysmes, des arrêts de travail et la destruction de capitaux », Marx souligne que le capitalisme traverse ces dernières « sans se suicider » et que ‘ces catastrophes le régénèrent et le ramènent à un niveau d’où il pourra reprendre son cours’. En effet, pour Marx, la nécessité de transformer la société de fond en comble naît au sein de ces cataclysmes répétitifs dans le cadre d’un mode de production obsolescent : le développement croissant des contradictions du capitalisme suffisent à féconder la nécessité de la révolution. Nulle part dans son œuvre, Marx ne met en place un raisonnement qui postule une « impossibilité économique du capitalisme » comme le lui attribue R. Luxemburg.
En effet, il n’existe pas de limites quantitatives prédéfinies au sein des forces productives du capitalisme qui détermineraient un point alpha précipitant ce mode de production dans la mort (que ce soit un pourcentage de taux de profit, une quantité donnée de marchés solvables ou extra-capitalistes, etc.). Les limites des modes de production sont avant tout socio-économiques, produites par leurs contradictions internes, et par la collision entre ces rapports devenus obsolètes et les forces productives. Dès lors, c’est le prolétariat qui abolira le capitalisme à la faveur de la manifestation de ses contradictions objectives, et pas ce dernier qui mourra de lui-même suite à un « effondrement », une « impossibilité économique objective du capitalisme ». Telle est la méthode posée par Marx : « La production capitaliste tend sans cesse à dépasser ces limites qui lui sont immanentes, mais elle n’y parvient qu’en employant des moyens qui, de nouveau et à une échelle plus imposante, dressent devant elle les mêmes barrières » [6].
Cependant, il est clair que si le capitalisme ne s’effondrera pas de lui-même, il n’échappera pas davantage à ses antagonismes destructeurs. Fin catastrophiste du système et catastrophe sont deux choses distinctes. Si la première conception défendue par R. Luxemburg postule l’existence d’une « impossibilité économique du capitalisme » qui mène à « l’effondrement économique inévitable du capitalisme… », l’autre défendue par Marx conçoit la possibilité de « catastrophes » et de « cataclysmes », mais qui le « régénèrent » pour le ramener « à un niveau d’où il pourra reprendre son cours ». Ce ne sont alors pour Marx que les « répétitions à une échelle toujours plus vaste » de cette spirale qui pousseront le prolétariat à la révolte, ouvrant la possibilité d’un « renversement violent du capitalisme ». En effet, s’il faut écarter toute vision catastrophiste, il faut cependant réaffirmer que le système capitaliste a déjà connu et connaîtra des crises, guerres et catastrophes d’ampleur croissante.
Dans les milliers de pages de l’œuvre de Marx et Engels, l’on peut bien dénicher à deux ou trois reprises le terme « effondrement » utilisé dans le sens d’une ‘faillite du système capitaliste’, cependant, jamais dans l’acception que lui a donné R. Luxemburg, à savoir une « impossibilité économique du capitalisme », fondant « la nécessité historique objective de l’effondrement du capitalisme », et découlant « d’un épuisement de la sphère extra-capitaliste ».
Si telle est vraiment la conception de Marx, pourquoi ne la retrouve-t-on que confidentiellement à deux ou trois occasions dans les milliers de pages de son œuvre ? Pour le moins, il aurait fallu la rencontrer en bonne place au sein de ses ouvrages principaux, or, on ne retrouve l’idée de l’effondrement du capitalisme chez Marx qu’à une seule reprise dans le brouillon du Capital [7] et dans la Neue Rheinische Zeitung Revue [8] … mais jamais dans son œuvre maîtresse : Le Capital [9] ! Quant à Engels, nous n’avons trouvé qu’une seule citation qui évoque ce terme [10]. Voilà une bien maigre récolte pour ce qui est censé constituer « le fondement de granit de la nécessité historique objective,… » !
Par contre, l’on rencontre abondamment l’idée contraire chez Marx, à savoir celle d’un capitalisme qui n’est pas condamné au suicide mais qui renaît sans cesse de ses cendres en plaçant la barre des enjeux à chaque fois plus haut, à la mesure de ses contradictions grandissantes comme nous l’avons rappelé ci-dessus. De même, l’on retrouve explicitement chez lui également l’idée qu’un mode de production ne s’effondre pas mais survit à ses contradictions tant qu’il n’a pas été renversé par une nouvelle classe révolutionnaire, même si cette survie doit se faire dans des formes de plus en plus barbares. Autrement dit, c’est tout à fait abusivement que R. Luxemburg et tous ceux qui la suivent attribuent leurs propres conceptions à Marx.
Les visions catastrophistes ont cette particularité de ne voir dans le capitalisme qu’une somme de contradictions irréconciliables qui le conduiraient inéluctablement à l’effondrement. R. Luxemburg parlait même de « fatalité » : « les contradictions immanentes du capitalisme, qui … doivent fatalement entraîner l’effondrement économique du capitalisme ». Ces visions procèdent d’un matérialisme mécaniste et d’un finalisme téléologique qui sont aux antipodes de la méthode marxiste, car, loin de se limiter à l’étude des contradictions et des obstacles au développement de la production capitalisme, Marx étudie tout autant les mécanismes de son expansion et de ses modes de régulation.
En effet, à lire une certaine littérature critique, on se demande vraiment comment le capitalisme n’est pas mort depuis longtemps ! Tout à l’opposé de ces visions mécanistes, Le Capital nous permet de comprendre aisément pourquoi le système a survécu et prospéré durant plus de trois siècles d’existence : « A mesure que l’accumulation diminue, disparaît aussi la cause de sa diminution, à savoir, la disproportion entre capital et force de travail exploitable. Le mécanisme du procès de production capitaliste élimine donc de lui-même les obstacles qu’il se crée spontanément » [11]. Le mécanisme même de la production capitaliste élimine spontanément les obstacles qu’il se crée ! A première vue surprenante, cette réflexion de Marx est fondamentale : elle indique clairement que le matérialisme historique ne se réduit pas à une collection de contradictions irréconciliables, mais qu’il conçoit tout autant l’existence de mécanismes dynamiques et autorégulateurs : « Les crises ne sont jamais que des solutions momentanées et violentes qui rétablissent pour un moment l’équilibre troublé [...] La stagnation survenue dans la production aurait préparé – dans les limites capitalistes – une expansion subséquente de la production. Ainsi le cycle aurait été, une fois de plus, parcouru. Une partie du capital déprécié par la stagnation retrouverait son ancienne valeur. Au demeurant, le même cercle vicieux serait à nouveau parcouru, dans des conditions de production amplifiées, avec un marché élargi, et avec un potentiel productif accru » [12].
A l’image du mouvement elliptique entraîné par l’équilibre des forces contraires, certains mécanismes centrifuges du capitalisme le mènent à des « cataclysmes », mais un autre mouvement centripète « le régénère régulièrement » et « ramène, par la violence, le capitalisme à un niveau d’où il pourra reprendre son cours ». Telle est la vision que Marx développe dans toute son œuvre : « Tout comme un corps céleste, une fois lancé dans un mouvement déterminé, répète constamment ce même mouvement, la production sociale, une fois lancée dans ce mouvement alterné d’expansion et de contraction, le répète constamment. Les effets deviennent à leur tour des causes, et les alternances dans l’ensemble du procès, qui reproduit constamment ses propres conditions, prennent la forme de la périodicité » [13].
Conséquent avec son analyse d’un capitalisme mû par des cycles répétés de contractions et d’expansions au sein d’un mouvement en spirales grandissantes, Marx a clairement établi que « des crises permanentes, çà n’existe pas » [14]. C’est aussi la critique de cette idée de « crise permanente » défendue par Henryk Grossman que fera Paul Mattick dans un article intitulé « "La crise permanente" : comment Henryk Grossmann interprète la théorie de l’accumulation capitaliste de Marx » [15]. Or, le dénominateur commun à toutes les visions catastrophistes des contradictions du capitalisme consiste justement à défendre cette idée de « crise permanente » si chère à Grossman, que ce soit :
– a) Rosa Luxemburg : « pour Rosa Luxemburg, c’est la totalité de la plus-value capitalisable qui ne peut être réalisée dans le capitalisme pur […] si dans une économie purement capitaliste, la totalité de la plus-value destinée à l’accumulation était irréalisable, il y aurait crise non plus périodique, mais permanente - et l’on voit mal comment le capitalisme aurait pu y survivre avant l’ère de la grande expansion impérialiste » [16].
– b) La Gauche Communiste de France : « Ces deux cours [à la guerre et à la révolution] ayant leur source dans une même situation historique de crise permanente du régime capitaliste… […] L’absence de nouveaux débouchés et de nouveaux marchés où puisse se réaliser la plus-value incluse dans les produits au cours du procès de la production, ouvre la crise permanente du système capitaliste. La réduction du marché extérieur a pour conséquence une restriction du marché intérieur. La crise économique va en s’amplifiant […] Prise dans ce sens historique, la guerre à l’époque impérialiste, présente l’expression la plus haute en même temps que la plus adéquate du capitalisme décadent, de sa crise permanente et de son mode de vie économique : la destruction » [17].
– c) Le CCI : « Lors du deuxième Congrès, nous avions pu constater la confirmation de ce qui était déjà notre analyse avant même la constitution officielle du CCI, à savoir : la fin de la période de reconstruction et l’entrée du système capitaliste dans une nouvelle phase de la crise permanente historique du système » [18] ; « La surproduction chronique , une entrave incontournable à l’accumulation capitaliste » [19] ; « La décadence du capitalisme est marquée par l’épanouissement des contradictions inhérentes à sa nature, par une crise permanente » [20].
Voilà des visions théoriques qui s’inscrivent bien dans la ligne de celle d’Henryck Grossman et qui sont bien loin de celle de Marx pour qui : « des crises permanentes, çà n’existe pas ».
Malheureusement, les conceptions catastrophistes ont déjà fait beaucoup de dégâts parmi les groupes révolutionnaires. Elles ont désarmé bon nombre d’organisations et de militants qui fondaient leurs convictions sur la base d’une fin proche du capitalisme, fin toujours annoncée pour le lendemain, et non sur une compréhension matérialiste, historique et dialectique de l’histoire et de ses changements sociaux. En effet, quelle que soit la gravité des crises que le capitalisme a connues dans le passé, et qu’il connaîtra encore dans le futur, ses convulsions économiques ne légitiment en rien toutes les prévisions récurrentes de fin ‘économique’ du monde, prévisions qui se sont d’ailleurs systématiquement révélées vaines. Ainsi :
– 1) Au 3ème congrès de l’Internationale Communiste, le KAPD défend la théorie de l’offensive à tout prix en s’appuyant sur la vision luxemburgiste selon laquelle le prolétariat est face à « l’impossibilité économique objective du capitalisme » et confronté à « l’effondrement économique inévitable du capitalisme… ».
– 2) S’appuyant sur une vision identique, le KAPN fonde une Internationale communiste-ouvrière (KAI) en 1922 en pleine période de reflux des luttes [21].
– 3) Après la grande crise économique de 1929, de nombreux groupes politiques oppositionnels à la troisième Internationale font faillite en prédisant la fin du capitalisme sur une base théorique analogue.
– 4) En 1938, ce sera au tour de Trotski de se fourvoyer en créant, lui aussi, une IVème Internationale en pleine période de reflux des combats de classe sur la base de cet autre postulat catastrophiste selon lequel « Les forces productives de l’humanité ont cessé de croître » [22].
– 5) En 1952, c’est au tour de la Gauche Communiste de France de disparaître pour sauver ses militants d’une troisième guerre mondiale que ce groupe pense imminente, car elle défend l’idée que le capitalisme est dans une crise économique permanente et a épuisé toutes ses possibilités.
– 6) Avec une telle filiation politique, il n’est pas étonnant que le CCI prévoit régulièrement « l’effondrement » du capitalisme [23] et « l’imminence » d’une révolution [24], révolution qu’il perçoit derrière chaque mobilisation sociale importante comme en Mai 68 [25] ou en Espagne 1975-76 [26]. C’était ce que son ancêtre au Venezuela annonçait déjà de façon « sûre … une lutte sanglante et directe pour la destruction de l’État bourgeois » [27] ! C’est donc sans gêne que cette organisation titre sa presse avec le slogan « Vive la crise ! », qu’elle a défendu l’idée d’un « cours à la révolution », et qu’elle soutient que les « années 80 étaient des années de vérité » au bout desquelles l’alternative de la guerre ou de la révolution allait être tranchée [28] ! L’on mesure ici la ‘justesse’ de telles analyses dont cette organisation se plaît à vanter la ‘rigueur’ et le ‘réalisme’ à chacun de ses congrès !
– 7) De multiples scissions émergeront du ‘PCI - Programme Communiste’ suite au décalage entre les attentes subjectives découlant de sa prévision de crise systémique du capitalisme en 1975 et la réalité objective qui fut plus prosaïque.
La responsabilité première des révolutionnaires est de réexaminer constamment leurs analyses et prévisions pour bien orienter leurs activités et interventions dans la classe afin de ne pas retomber dans les mêmes ornières et visions catastrophistes du passé. C’est un des objectifs essentiels de Controverses, et nous pensons que ce devrait être l’objectif de bien des groupes et éléments au sein de la Gauche Communiste. En effet, les erreurs ne se transforment en enseignements précieux que si « Un mouvement révolutionnaire […] doit chaque jour, pour ainsi dire, jeter sur la place publique ses thèses pour en démontrer la justesse. Seul un parti conservateur peut faire le contraire, et vivre jalousement sur son patrimoine de principes, en ce sens qu’il les respecte dans le même temps qu’il s’estime dispensé d’en discuter contradictoirement avec qui que ce soit [...] Et discuter signifie pouvoir mettre en cause ce qui serait mal énoncé et mal fait, indépendamment de toute prérogative attribuée à des groupes, des hommes et des partis. S’agit-il de répéter la vieille apologie de la liberté de penser et de critiquer comme droit de l’individu ? Certes non. Il s’agit d’établir le mode physiologique de fonctionnement et de travail d’un parti révolutionnaire qui doit conquérir et non conserver les acquis du passé, qui doit envahir les territoires de l’adversaire et non enfermer les siens dans les tranchées ou derrière des cordons sanitaires » [29].
Défendre que le capitalisme est en crise permanente et annoncer constamment qu’il est à deux doigts de s’effondrer, que la révolution est au seuil de la porte, que l’organisation doit être en permanence prête pour assumer les combats décisifs, tel est le crédo du catastrophisme. Malheureusement, des générations entières de militants s’y sont épuisés, et bon nombre d’entre eux ont renoncé au marxisme, voire l’on renié. Telle est la triste réalité du catastrophisme. Cette théorie ne fonde pas la perspective du communisme, l’activité révolutionnaire et la conviction militante sur une analyse matérialiste, historique et dialectique des contradictions de classe, mais sur un immédiatisme mécaniste et téléologique dont la justification théorique a pour seule fonction de légitimer l’urgence du sacrifice militant pour les besoins de l’organisation.
A l’opposé de toutes ces visions catastrophistes, le réel effondrement du capitalisme sera politique et social sur un arrière fond de paupérisation brutale et d’incapacité de la bourgeoisie à offrir une issue crédible à son système. Si le prolétariat ne met pas fin au règne du capitalisme, celui-ci ne s’effondrera pas de lui-même. Il n’y a jamais de « situation sans issue » pour le capitalisme, disait Lénine, il trouvera toujours à survivre à ses propres contradictions, quitte à s’enfoncer dans des formes de régressions de plus en plus barbares. Catastrophisme et catastrophes sont deux notions très différentes. S’il faut se débarrasser des croyances en l’existence d’une « limite de l’impossibilité économique du capitalisme » et de « l’effondrement économique du capitalisme » comme le pensait R. Luxemburg, par contre, il est absolument certain que la survie d’un capitalisme obsolescent ne peut qu’engendrer des catastrophes économiques et sociales croissantes. Ce sont elles qui constituent le terreau potentiel pour un développement de la conscience au sein de la classe ouvrière de la nécessité d’une remise en question du capitalisme en tant que système.
C.Mcl
[1] Rosa Luxemburg, Anticritique.
[2] a) « Marx avait prédit l’effondrement du capitalisme par le fait de ses contradictions immanentes ».
– b) « …Marx insiste sur les contradictions immanentes du capitalisme, qui provoquent des crises périodiques de plus en plus violentes et doivent fatalement entraîner l’effondrement économique du capitalisme ».
– c) « Le capital n’est pas qu’à sa naissance ’dégouttant de sang et de boue par tous les pores’, mais pendant toute sa marche à travers le monde ; c’est ainsi qu’il prépare, dans des convulsions toujours plus violentes, son propre effondrement ».
– d) « Cependant, à un certain degré de développement, les conditions de l’accumulation se transforment en conditions de l’effondrement du capital ».
– e) « Par ce processus [de rétrécissement des marchés extra-capitalistes], le capital prépare doublement son propre effondrement… ».
– f) « …l’accumulation devient impossible, la réalisation et la capitalisation de la plus-value deviennent des problèmes insolubles. Au moment où le schéma marxien de la reproduction élargie correspond à la réalité, il marque l’arrêt, les limites historiques du processus de l’accumulation, donc la fin de la production capitaliste. L’impossibilité de l’accumulation signifie du point de vue capitaliste l’impossibilité du développement ultérieur des forces de production, et donc la nécessité historique objective de l’effondrement du capitalisme ».
[3] « Pour Marx, la rébellion des ouvriers, la lutte des classes - et c’est là ce qui assure leur force victorieuse - sont les reflets idéologiques de la nécessité historique objective du socialisme, qui résulte elle-même de l’impossibilité économique objective du capitalisme à un certain stade de son développement. […] ces conflits sociaux ou politiques ne sont en dernier ressort que le résultat de l’impossibilité économique du capitalisme, et ils s’exaspèrent dans la mesure où cette impossibilité devient sensible. Supposons au contraire avec les « experts » la possibilité d’une croissance illimitée de l’accumulation : le socialisme perd alors le fondement de granit de la nécessité historique objective,… » Rosa Luxemburg, Anticritique.
[4] « On le voit : l’écroulement du capitalisme a été soit nié, soit fondé de manière volontariste, à l’aide de moments politiques, extra-économiques. On n’a jamais produit la démonstration économique de la nécessité de l’écroulement du capitalisme » H. Grossmann, La loi de l’accumulation et de l’effondrement du système capitaliste.
[5] Grundrisse, Éditions 10/18, Tome IV : 17-18. Le lecteur trouvera plus de précisions par rapport à cette « échelle toujours plus grande » dans notre article « Comprendre la crise » du n°1 de Controverses.
[6] Éditions Sociales, Livre III, tome VI : 263.
[7] « Cette demande créée par la production elle-même incite à négliger la juste proportion de ce qu’il faut produire par rapport aux ouvriers : elle tend à dépasser largement leur demande, tandis que, par ailleurs, la demande des classes non ouvrières disparaît ou se réduit fortement, c’est ainsi que se prépare l’effondrement » Marx, Grundrisse, chapitre du Capital, Procès de circulation du capital, Édition Sociales, tome I : 360.
[8] « La bourgeoisie le célèbre, son grand festival, à un moment où l’effondrement de son ordre social dans toute sa splendeur est imminent, un effondrement qui démontrera plus puissamment que jamais comment les forces qu’elle a créées ont échappé à son contrôle. Lors d’une future exposition la bourgeoisie n’apparaîtra peut-être plus comme les propriétaires de ces forces productives mais seulement comme ses cicerone » Neue Rheinische Zeitung Revue, May-October 1850, notre traduction.
[9] Il existe bien un passage utilisant le terme « d’effondrement » dans le livre III du Capital, mais il fait référence à une chute, non du capitalisme, mais de la production, chute qui est contre balancée par des tendances contraires. Il n’y a donc rien dans cette citation qui vient accréditer les visions que R. Luxemburg attribue à Marx : « Ce processus ne tarderait pas à entrainer l’effondrement de la production capitaliste si des tendances contraires n’agissaient pas continuellement pour produire un effet décentralisateur parallèlement à la force centripète » La Pléiade II, Livre III : 1028.
[10] « Mais depuis ce temps, la grande industrie a porté les contradictions qui sommeillaient dans le mode de production capitaliste à l’état d’antagonismes si criants que l’on peut pour ainsi dire toucher du doigt l’effondrement proche de ce mode de production… » Engels, Anti-Dühring.
[11] Marx, Le Capital, Livre I, 4ème édition allemande, Éditions Sociales 1983 : 694.
[12] La Pléiade II, Livre III : 1031 - 1037.
[13] Marx, Le Capital, Livre I, 4ème édition allemande, Éditions Sociales 1983 : 710.
[14] Théories sur la plus-value, Éditions sociales II : 592.
[15] International Council Correspondence n°2 (volume 1) de novembre 1934.
[16] Introduction d’Irène Petit à L’accumulation du Capital de Rosa Luxemburg.
[17] Rapport sur la situation internationale, conférence de la Gauche Communiste de France en juillet 1945.
[18] Revue Internationale n°18 (1979), 3ème congrès du CCI.
[19] Titre d’un article dans la Revue Internationale n°141 (2010).
[20] Revue Internationale n°15 (1978), p.1.
[21] Le KAPN défend surtout les positions de Herman Gorter et est issu de la tendance de Essen du KAPD.
[22] « La prémisse économique de la révolution prolétarienne est arrivée depuis longtemps au point le plus élevé qui puisse être atteint sous le capitalisme. Les forces productives de l’humanité ont cessé de croître. Les nouvelles inventions et les nouveaux progrès techniques ne conduisent plus à un accroissement de la richesse matérielle », extrait du Programme de Transition qui fut adopté en 1938 comme Manifeste du marxisme révolutionnaire à l’époque de l’impérialisme – celle des guerres et des révolutions par le congrès de fondation de la IVème Internationale trotskyste.
[23] « A l’aube des années 80, le capitalisme mondial se trouve donc confronté à une impasse économique totale » Revue Internationale n°26 (1981), textes du 4ème congrès du CCI, Résolution sur la crise. Trente ans après, l’on mesure la vanité de ces sentences constamment répétées.
[24] « L’entrée du capitalisme, au milieu des années 60, dans une phase de crise économique aigüe signifie l’imminence de la perspective définie par l’IC : ‘guerre impérialiste et révolution prolétarienne’, comme réponse spécifique de chacune des deux principales classes de la société à une telle crise » Revue Internationale n°18 (1979), p.19, textes du 3ème congrès du CCI : Le cours historique.
[25] « La période qui s’est déclenchée en mai 1968 devrait voir à court terme l’apparition de grèves de masse violentes remettant en cause les fondements mêmes du capital » Révolution Internationale, ancienne série, n°7 (1972), éditorial, page 4.
[26] « [Le prolétariat espagnol] constitue le détachement avancé de l’immense armée prolétarienne qui, aussi bien à l’Est qu’à l’Ouest, a relevé la tête… Le prolétariat a resurgi sur un terrain devant lui permettre d’orienter les événements vers leur issue révolutionnaire. Ce terrain, c’est son indépendance de classe, cette issue, c’est la prise de pouvoir politique » Revue Internationale n°6 (1976), Brèves leçons espagnoles, p.35.
[27] Internationalismo, janvier 1968, cité dans l’article « Dix ans du CCI », Revue internationale n°40.
[28] « Dans la décennie qui commence, c’est donc cette alternative historique qui va se décider : ou bien le prolétariat poursuit son offensive, continue de paralyser le bras meurtrier du capitalisme aux abois et ramasse ses forces pour son renversement, ou bien il se laisse piéger, fatiguer et démoraliser par ses discours et sa répression et, alors, la voie est ouverte à un nouveau holocauste qui risque d’anéantir la société humaine » Revue Internationale n°20, 1980.
[29] Bordiga, « Russie et révolution dans la théorie marxiste », dans le chapitre intitulé « Le danger d’opportunisme et l’Internationale ».